« ACCIDENT INDUSTRIEL » OU HOMICIDE ?
A Marcoule, le 12 septembre 2011, José Marin, est mort dans un accident du travail dans l’explosion d’un incinérateur de déchets radioactifs, sur le site nucléaire de Centraco appartenant à Socodei, filiale d’EDF. Le site CENTRACO emploie 350 personnes (190 SOCODEI et 160 prestataires, les uns et les autres travailleurs du nucléaire exclus des statuts EDF ou CEA). Aucune information n’a été donnée, ni sur le statut et le travail de José sur le site (sous-traitant de 1er, 2e, 3e niveau ?), ni sur son âge, ni sur la douleur de ceux qui l’aimaient. Trois autres travailleurs du site ont été blessés, dont on ne connaît pas les noms. L’un d’entre eux, un apprenti, brûlé au 3e degré sur 85% du corps, est entre la vie et la mort à l’hôpital militaire de Percy-Clamart. Par un journal espagnol, on apprend que José Marin, mort, est resté 48 heures dans le hangar avec le métal radioactif dans le corps. Ce qui signifie que la famille n’a pas même pu se recueillir auprès de lui, dans ces dramatiques premières heures qui suivent la survenue du décès d’un proche. Cet hommage des siens, si nécessaire à la paix des vivants, lui aura été refusé pour cause de secret radioactif !
Quelques heures après l’accident, l’ASN communique : « L’accident survenu ce matin dans l’installation nucléaire Centraco située près du site de Marcoule (Gard) est terminé. » et EDF ajoute : « C’est un accident industriel, pas nucléaire. Il n’y a pas de rejet radioactif et a priori, il n’y en aura pas. ». Des enquêtes sont en cours… En d’autres termes, « circulez, il n’y a rien à voir ! ». Rien d’intéressant puisque rien n’est radioactif, nous est-il répété…
Un parallèle s’impose !
A Turin, ils s’appelaient Antonio Schiavone, Roberto Scola, Angelo Laurino, Bruno Santino, Rocco Marzo, Giuseppe Demasi, Rosario Rodinò. Ouvriers dans l’usine sidérurgique Thyssenkrupp à Turin, ils sont morts un soir de décembre 2007, tués par un incendie faisant suite à une explosion. La direction du groupe avait décidé de ne plus investir dans la sécurité, l’entreprise devant être fermée. Le lendemain de l’accident, une immense manifestation d’indignation dans les rues de Turin avait apporté un soutien aux familles et exprimé un appel vibrant à la justice. La mort au travail, la « mort blanche » telle qu’elle est désignée par les Italiens, relève de la plus injuste, de la plus indigne violence du pouvoir industriel.
Le 16 avril 2011, le tribunal pénal de Turin a condamné à 16 ans et demi de prison ferme le directeur général de la branche acier du groupe allemand Thyssen Krupp, Harald Espenhahn, 45 ans, originaire d’Essen (ouest de l’Allemagne), jugé pour « homicide volontaire ». Quarante huit anciens ouvriers s’étaient constitués partie civile, de même que la commune et la province de Turin, la région du Piémont, des syndicats et des associations. Des peines sévères ont également été prononcées à l’encontre des cinq autres dirigeants de l’usine Thyssenkrupp. Gerald Priegnitz, Marco Pucci, Raffaele Salerno et Cosimo Cafuerri ont été condamnés à 13 ans et 6 mois, Daniele Moroni à 10 ans et 10 mois de prison ferme pour « homicide involontaire » (Il Manifesto, 17 avril 2011).
Les associations Henri Pézerat et Sous-traitance – Santé – Nucléaire – Chimie en appellent à la mobilisation pour briser l’indifférence et l’impunité de ceux qui, à Marcoule comme à Turin, portent la lourde responsabilité de la mort de jeunes ouvriers tués au travail.
Communiqué de presse, 28 septembre 2011, Association Henri Pézerat, Association Santé-Sous-traitance-Nucléaire-Chimie