Le 24 octobre 2009, le maire de Fontenay-sous-Bois Jean-François Voguet a prononcé un discours à la maison du citoyen pour la création de l’Association Henri Pézerat.
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Je suis très heureux de pouvoir être à vos côtés aujourd’hui pour saluer la naissance de la Fondation que vous créez, et qui va porter le nom de Henri Pézerat.
Heureux, et puis fier aussi que Fontenay-sous- Bois… avec sa Maison du Citoyen… devienne le foyer du travail que vous vous proposez d’accomplir pour poursuivre l’œuvre et le combat de Henri Pézerat, un homme qui a tant accompli pour donner au mot de « citoyen » tout son sens et tout son honneur.
En ce début de 21ème siècle, nous sommes dans un segment difficile et complexe de l’histoire du monde. Nous voyons sous nos yeux — quasiment « in vivo », pourrait-on dire dans le vocabulaire scientifique — combien nous sommes à un carrefour de civilisation. Un carrefour qui s’exprime par toute une série de paradoxes terribles qui se posent en autant de défis urgents aux hommes de notre temps pour les affronter et les dépasser…
Je pense évidemment au premier chef, car c’est de lui que découlent tous les autres, au paradoxe entre une accumulation exponentielle de richesses entre les mains de quelques-uns et la pauvreté pour les trois quarts de la planète… Et au rang de ces paradoxes du siècle, il y a, me semble-t-il, cette confrontation entre une explosion formidable des capacités de l’esprit humain et la mise au pas de la pensée. L’intelligence humaine est devenue capable d’accomplir dans tous les domaines des prodiges auparavant impensables et de faire faire des pas de géant à la civilisation… Et — en même temps — nous sommes dans une période où les forces d’argent, les puissances économiques et les pouvoirs politiques déploient une énergie considérable pour asservir la pensée, pour corrompre la connaissance, ou pour s’obtenir à tout le moins le consentement tacite dont ils ont besoin pour continuer le « business ». Et tout cela au prix naturellement de sacrifier la justice sociale, l’intégrité physique des travailleurs, la santé des populations, et jusqu’à l’avenir de la planète. Nous voyons, à travers ces confrontations permanentes, et si dures parfois, combien nos sociétés se trouvent confrontées à des choix cruciaux — des choix qui se posent au niveau collectif de la société toute entière, aussi bien qu’au niveau individuel, à chacun dans sa vie, pour décider des combats qu’il mène ou ne mène pas.
Ces choix d’homme, de scientifique et de citoyen, ces choix de conscience, Henri Pézerat les a faits… Ces combats, il les a menés tout au long de sa vie, avec la valeur de son travail scientifique, avec un courage et une ténacité qui ont été à la mesure des puissances qu’il avait à affronter pour faire avancer la cause des hommes devant la loi de l’argent. Ce que nos concitoyens connaissent le mieux de lui, c’est qu’il fut un pionnier sur les questions de l’amiante pour briser la règle du silence, de l’aveuglement et de la complicité. Il fut, en fait, sur tous les fronts des grands enjeux des nouveaux risques environnementaux, de la santé au travail avec les accidents et les maladies professionnelles, de l’organisation économique telle qu’elle est aujourd’hui pratiquée, avec la flexibilité et la sous- traitance qui permettent de masquer les problèmes de santé infligés aux travailleurs. Et il fut sur ce front tout aussi essentiel de l’intégrité du monde scientifique pour se dégager de l’influence et de la corruption de l’industrie, pour faire entendre la voix citoyenne d’une pensée libre et d’une recherche indépendante.
Avec l’irruption que l’on voit aujourd’hui sur la scène publique de la gravité et de l’ampleur des problèmes de santé dans l’entreprise… et pas seulement à France- Télécom, mais dans des milliers d’entreprises… chacun peut mesurer ce que nous devons à des hommes tels qu’Henri Pézerat pour qu’enfin puisse être remis en cause un système inhumain qui fait que le travail tue, abîme et mutile tant de salariés dans leur chair, dans la dignité de leur personne, dans leur être social.
Je vous le disais à l’instant : je suis vraiment très heureux d’être parmi vous aujourd’hui. C’est avec beaucoup de chaleur que je veux saluer l’initiative que vous avez prise de créer cette Fondation. Je veux vous en remercier au nom de tous nos concitoyens, au nom des milliers de salariés qui travaillent dans notre ville… Et je veux profiter de cette occasion pour vous réaffirmer tout notre soutien dans la tâche que vous vous êtes donné de prolonger la démarche de Henri Pézerat, de faire fructifier son travail et son combat au bénéfice de tous. Ce combat-là, nous nous y sentons nous-mêmes pleinement engagés pour défendre nos concitoyens dans leurs droits à la santé, à la dignité, au respect, à une vie meilleure, plus juste et plus humaine, dans un environnement sain et une planète sauvegardée.
Je souhaite de tout cœur bienvenue à Fontenay à la Fondation Henri Pézerat, et puis une longue et bonne route.