Fiche n°11
Pour l’interdiction de la sous-traitance
sur les sites Seveso et nucléaires
Etat des lieux
AZF Toulouse
» M. Biechlin, directeur d’une usine Seveso II seuil haut, installée en zone urbaine, ne pouvait pas ignorer les risques découlant du mélange de nitrates et de produits chlorés « , affirment les juges de la cour d’appel de Toulouse, jeudi 24 septembre 2012, dans le prononcé du jugement concernant la catastrophe AZF du 21 septembre 2012. La condamnation est prononcée par le président : 3 ans de prison dont un ferme et 45 000€ d’amende pour M. Biechlin, 225 000€ d’amende pour la société Grande Paroisse,filiale à 100% du groupe Total. C’est le maximum requis par la loi. C’est peu au regard des conséquences d’une telle négligence. S’ajoutent, cependant, à la sanction pénale, plusieurs millions d’indemnisation pour les parties civiles.
Après avoir écarté les autres hypothèses jugées « non fondées », le président de la Cour d’appel de Toulouse lit la liste des infractions retenues par les juges. Il souligne le « désintérêt » de M. Biechlin pour les risques supportés par les travailleurs extérieurs, l’absence de rigueur dans l’organisation de la filière déchet, l’absence de contrôle sur la séparation effective des espaces selon la nature de produits chimiques dangereux et incompatibles entre eux. Enfin, l’arrêt insiste sur l’absence de formation et d’information des salariés d’entreprises sous-traitantes concernant les dangers de ces déchets chimiques : » Il s’agit là de la plus grave parmi toutes les fautes retenues, puisque la décision a été prise, en pleine connaissance de cause, de mettre les salariés en situation de risque sans leur donner les moyens d’y faire face, la conséquence étant, ainsi que les faits du 21 septembre 2001 l’ont amplement démontré, de mettre non seulement ces salariés mais toute l’entreprise et même au-delà la population toulousaine en situation de danger permanent. «
Servitudes nucléaires, cancer radio-induit :
Le décès de Christian Verronneau est survenu le lundi 10 septembre 2012. Salarié de la société Endel GdF Suez, Christian Verronneau avait contracté un cancer du poumon, qui a été reconnu comme maladie professionnelle en rapport avec les rayonnements ionisants, tableau 6 de la liste des maladies professionnelles de la sécurité sociale. Ce cancer résulte de 20 ans de travail sous rayonnements, travail accompli par les travailleurs invisibles d’entreprises sous-traitantes de l’exploitant EDF, chargés de la maintenance des installations nucléaires. En sous-traitant les travaux les plus radioactifs de l’entretien des centrales, les exploitants du nucléaire sous-traitent aussi leur responsabilité des maladies et des morts radio-induites.
Sous-traitance de la gestion des déchets nucléaires :
A Marcoule, le 12 septembre 2011, José Marin, est mort dans un accident du travail dans l’explosion d’un incinérateur de déchets radioactifs, sur le site nucléaire de Centraco appartenant à Socodei, filiale d’EDF. Le site CENTRACO emploie 350 personnes (190 SOCODEI et 160 prestataires, les uns et les autres travailleurs du nucléaire exclus des statuts EDF ou CEA).
Aucune information n’a été donnée, ni sur le statut et le travail de José sur le site (sous-traitant de 1er, 2e, 3e niveau ?), ni sur son âge, ni sur la douleur de ceux qui l’aimaient. Trois autres travailleurs du site ont été blessés, dont on ne connaît pas les noms. L’un d’entre eux, un apprenti, brûlé au 3e degré sur 85% du corps, a été soigné à l’hôpital militaire de Percy-Clamart. Aucune information n’a été donnée sur le devenir de ces trois ouvriers blessés. Par un journal espagnol (http://www.publico.es), on apprenait seulement que José Marin, mort, est resté 48 heures dans le hangar avec le métal radioactif dans le corps. Ce qui signifie que la famille n’a pas même pu se recueillir auprès de lui, dans ces dramatiques premières heures qui suivent la survenue du décès d’un proche. Cet hommage des siens, si nécessaire à la paix des vivants, lui aura été refusé pour cause de secret radioactif ! Mais quelques heures après l’accident, l’ASN communiquait : « L’accident survenu ce matin dans l’installation nucléaire Centraco située près du site de Marcoule (Gard) est terminé. » et EDF ajoutait : « C’est un accident industriel, pas nucléaire. Il n’y a pas de rejet radioactif et a priori, il n’y en aura pas. ».
Accident industriel majeur, maladies radio-induites, accident du travail en milieu radioactif… ces trois évènements sont tout sauf anecdotiques. Ils résultent du choix délibéré des industriels de sous-traiter la responsabilité des risques et leurs conséquences, au mépris de la vie humaine.
Propositions
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Adopter une loi d’interdiction du recours à la sous-traitance et à l’intérim sur les sites Seveso et nucléaires ;
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Organiser le suivi post-exposition et post-professionnel des salariés sous-traitants et intérimaires étant intervenus sur les sites à risques.